hangover (priam)

(calgary, 8:00 am)

oh, désolé, j'tai réveillé ? t'imagines encore parfaitement son sourire narquois à l'autre bout du fil après qu'il ait mis fin à la conversation. il te connait assez bien pour savoir que t'arriveras pas à retrouver le sommeil une fois extirpé de tes songes. foutu entraineur. foutues soirées trop alcoolisées. et foutu soleil qui se pointe bien trop tôt dans le ciel à cette époque de l'année. tu soupires, quittant la chaleur confortable de ton lit pour rejoindre celle de la machine à café que t'as encore une fois oublié de mettre en route. un juron passe la barrière de tes lèvres. y'a qu'une cafetière vide pour te mettre de mauvaise humeur autant qu'un appel impromptu à huit heures du matin. un passage rapide par la salle de bain t'indique que la petite fête d'hier devait vraiment être mémorable vu ta tête et le peu de souvenirs que t'en as. t'as pas le temps de t'attarder sur ce détail qu'un bourdonnement dans ta boîte crânienne te rappelle à l'ordre : caféine. t'enfiles rapidement des fringues, plus histoire d'avoir quelque chose sur le dos qu'autre chose et quitte hâtivement ton appart' en direction du starbucks le plus proche. foule matinale. calgary qui s'éveille. l'enseigne en vue, tu te presse sans t'en rendre compte pour avoir, dix minutes plus tard, ton remède anti gueule de bois entre les doigts.

il est tôt, beaucoup trop tôt. en temps normal tu serais déjà en train de te préparer, tu serais en train de rassembler tes affaires de snow, tu roulerais en direction des sommets enneigés. mais ce temps là est terminé depuis quelques mois, depuis cette foutue chute qui t'a brisé les os, depuis que ton corps t'as lâché. t'as l'impression de n'être qu'un foutu handicapé privé de ses membres. pourtant tu marches presque correctement, mais tu trouves quand même le moyen de te plaindre. heureusement tu va bientôt retrouver ta board, c'est une question de quelques mois. ton coach t'as bien proposer de rester avec l'équipe, de les conseiller. mais t'as jamais eut la patience pour faire ce genre de truc, alors t'es parti, t'es rentré à Calgary depuis un temps déjà. tu passes tes matinées au centre de rééducation du coin, à côtoyer des mecs bien plus handicapés que toi. mais avant d'aller 't'amuser', tu passes toujours au starbuck, histoire de réveiller ta cervelle. gobelet dans une main et donuts bourré de sucre dans l'autre, tu poses ton cul sur une chaise et fais couler une gorgée de liquide chaud dans ta gorge. la neige te manque, t'en a marre de côtoyer le bitume. ton regard s'accroche à des yeux océans que tu ne connais que trop bien. tu mords dans ton donuts, t'hallucine pas, c'est bien Ezio qu'est planté à quelques mètres de toi.

ton regard parcourt la salle. c'est pas ton genre de te poser ici mais t'as bien envie de faire une exception aujourd'hui. de prendre un peu ton temps avant de rejoindre les sommets enneigés de calgary pour un énième entrainement. un léger sourire étire tes lèvres à cette pensée. t'aurais jamais cru qu'une lubie de gamin en manque d'attention te mènerait aussi loin. un siège libre attire ton regard et tu perds ton sourire à la vue de la personne déjà installée à cette table. c'est une blague, c'est ça ? là, à quelques pas, priam te fixe et tout ce que tu t'étais efforcé d'oublier te reviens à la figure. mais par dessus un léger sentiment de colère, tu peux pas t’empêcher de te demander ce qu’il est devenu. t’as tellement de question qui t’assaillent d’un coup que tu t’y noierais presque. avant même que t’en prenne conscience, tu te retrouves assis face à lui sans le quitter des yeux. comme si t’avais peur qu’il se volatilise encore une fois.

- je vois que prévenir fait toujours pas partie de ton vocabulaire.

tu t’attendais à ce que le son de ta voix se fasse plus sec mais tu te surprends à plus savoir comment réagir face à lui. tu lui en veux clairement. pas d’avoir saisit sa chance mais de s’être barré sans un mot alors que tu pensais compter plus que ça à ses yeux. vous avez évolué depuis le temps. chacun de votre côté et sans savoir pourquoi, ça te fais un peu peur. peut-être parce que tu te rends compte que plus rien ne sera jamais comme avant.